lundi 30 novembre 2015

Nouveau défi!

Avant d’y mettre les pieds, on imagine le Nord comme une immense étendue uniformément blanche rassemblant des villages et des habitants similaires. Bon, ce n’est pas tout à fait faux. Il demeure que parfois, dans la vie, on ressent le besoin de sortir de ses pantoufles. On se hasarde donc à changer d’emploi, de village et on se croise les doigts. Puis, la vie nous sourit : )





J’ai déménagé mes pénates à Inukjuak, 2 petits parallèles plus bas que Kangirsuk. Mais surtout, je passe de la Baie d’Ungava à la Baie d’Hudson! Pour les non-initiés, sachez qu’il existe une certaine rivalité/confusion entre les deux côtes. Chacune est desservie par un Centre de Santé qui lui est propre; Tulattavik sur l’Ungava et Inuulitsivik sur l’Hudson. Ces deux organisations offrent pratiquement les mêmes services et les mêmes emplois, tout en étant gérées de manière distincte. On connaît des gens qui ont dû repasser à travers tout le processus d’embauche afin de pratiquer le même travail sur l’autre côte. L’harmonisation des services à l’ensemble du Nunavik est discutée depuis plusieurs années, mais il n’y a jamais rien de simple au Nord. Pour ajouter à la confusion, je suis encore employé par l’Ungava bien que je travaille maintenant sur l’Hudson. Enfin…


Un tout nouveau Centre pour adolescentes a transféré ses activités de Montréal à Inukjuak. On vient tout juste de l’inaugurer. J’ai entendu différents termes pour désigner le bâtiment; palais, château, gouffre à argent… Gouffre à argent? Serait-ce qu’un investissement de 27M$ sur une bâtisse hébergant 10 jeunes n’est pas bien accueilli en période d’austérité budgétaire?



Les photos ne rendent pas justice à la majesté de l’endroit. Nous sommes situés en haut de la montagne, profitant d’une vue dégagée sur le village et la rivière qui se recouvre un peu plus de glace à chaque jour. On y a intégré les meilleurs éléments des Centres au Sud, tout en triplant la superficie. Et en se dotant d’une flotte de 5 motoneiges et 5 quatre-roues. Et un bateau. L’objectif ne saurait être plus clair. On fait le pari qu’un environnement spacieux, illuminé et –surtout- en territoire Inuit, favorise la réhabilitation de ses adolescentes aux prises avec des familles dysfonctionnelles et des identités floues. Bref, la philosophie inverse de nos chers décideurs québécois qui s’entêtent à construire des bunkers de béton en guise d’écoles au lieu de s’inspirer des grands sages scandinaves.
Tout ça pour dire que je retourne à mes anciennes amours de la ville, soit éducateur à l’interne. Un meilleur lien avec les jeunes, une collaboration étroite avec des collègues inuits, un emploi plus actif… Je ne peux m’empêcher de sourire à l’idée d’être rémunéré à pratiquer la pêche sur la glace avec les jeunes demoiselles. Avis aux intéressés, éducateurs et agents d’intervention seront requis dans les prochains mois afin de remplacer des vacances, et peut-être éventuellement pourvoir à des postes.


Inukjuak est un coquet village de 1600 habitants. Son nom signifie le Géant. Je couvrirai son intrigant historique lors d’une prochaine entrée. À mon départ de Kangirsuk, on m’avait mis en garde comme quoi les habitants d’Inukjuak parlaient très forts(!) Je ne saurais dire. Peut-être mon inuktitut n’est-il pas suffisamment à point pour le déceler? On m’expliquait également qu’il y a des différences au niveau du vocabulaire entre les villages, encore plus entre les 2 côtes. Certains mots ne sont pas universels, des symboles de l’alphabet se font fugaces. Enfin, on me signalait une utilisation bien moindre de la voiture au profit du 4-roues et du skidoo. Ça, je peux le confirmer. Ils ont tout compris. À quoi bon avoir un gros truck à 40 000$ pour ajouter 11km au compteur quotidiennement?

Malgré les mises en garde, il n'est pas rare de croiser une famille de 5-6 personnes sur le même véhicule. Ils ont l'habitude. Les accidents se font rares.

Il règne une belle ambiance au village. Les gens sont chaleureux. Les aurores boréales sont ravissantes. L’hiver nous montre le côté givré de sa bipolarité. En attendant les grands froids et les blizzards, on bénéficie d’un terrain de jeu digne d’Éden.

Une petite parcelle de plage qui résiste tant bien que mal. Semblerait que le bronzage et la baignade sont partie intégrante de l'été ici. Au même titre que les moustiques qui se régalent.